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Appel
Date limite de soumission : lundi 5 février 2024
Le point de départ de notre réflexion est de nous interroger sur le sens historique et politique de cette catégorie juridique de communauté. Il s’agit de mettre en lumière la tradition historique sur laquelle elle se construit et d’en reconstituer les contours politiques et économiques. Se réclame-t- elle d’une définition diffusée par les institutions politiques et ses politiques publiques ? Est-elle la résultante d’une forme spontanée d’organisation ? Comment se construisent ses logiques d’appartenance ? Et en toute fin, traduit-elle une autonomie juridique, voire une certaine forme de souveraineté ? (Barreyre ; Verdo, 2014). Souveraineté autochtone ou paysanne, ces nouvelles figurations du collectif s’appuient sur deux personnalités bien distinctes. Parfois complémentaires, la personnalité juridique des communautés autochtones et la personnalité collective des communautés paysannes interrogent la notion même de territoire et des différents droits de propriétés qui lui sont attachés. Ces droits de propriété se déclinent et s’affirment autour d’une souveraineté territoriale qui forge le collectif. Cette nouvelle logique de classification politique autour de la communauté répond à diverses prérogatives étatiques, nationales ou provinciales. En effet, la défense d’un territoire s’affirme en même temps que s’énonce une identité collective (autochtone ou paysanne). Pour autant, cette dernière s’énonce dans le champ des catégories institutionnelles. Condition sine qua non pour la rendre effective politiquement.
A la lumière d’une anthropologie juridique et historique où les illégalismes résonnent à l’époque des indépendances avec ses bouleversements sociaux, économiques, politiques. Ses nouvelles lois, règlements et ses nouvelles institutions. Nous nous intéressons donc aux pratiques plurielles des acteurs, « à toute une série de pratiques illégalistes » (Foucault, 2004 p.321) qui s’expriment sous un pluralisme juridique (Gurvitch, 1931). En effet, les illégalismes se définissent comme « l’ensemble des pratiques qui soit transgressent délibérément, soit contournent ou même détournent la loi » (Gros, 2010). Cet enchâssement de droits est mobilisé, approprié, contourné ou produit par une pluralité d’acteurs : « il est le lieu où s’inventent et se constituent positivement de nouveaux espaces micro-politiques inédits de domination, de liberté, de résistance » (Xifaras, 2015). Nous nous intéressons donc aux droits de propriété, dans ses spécificités latino-américaines et les formes sociales qui les accompagnent. Sur le plan historique et économique, la naissance et le renforcement d’un marché de vente directe de la terre à des gros propriétaires terriens plus particulièrement après les guerres civiles entre Unitaires et Fédéraux dans la première partie du 19ème siècle a participé à cette déterritorialisation comme dans le cas de Corrientes entre (Buchbinder, 2004 ; Schaller, 1995 et 2001). La mise en place de l’emphytéose dès 1826 pour les paysans dans le Rio de la Plata et la distribution de terres communautaires pour les populations autochtones auront une attention particulière. En effet, nous verrons qu’une approche socio-historique du territoire démontre que, bien avant la construction d’un État-nation argentin, il existait une intention des différentes provinces de diviser les terres entre petits agriculteurs, terres communautaires ou colonies agricoles et non pas de tendre directement vers un système latifundiste. L’exploitation économique de ces nouveaux territoires nationaux tout au long du XIXe siècle s’impose comme nouvelle donne géopolitique avec laquelle il faut pactiser, lutter et négocier. Les illégalismes ne sont jamais loin, parfois tolérés, souvent condamnés. Ils sont pourtant « un élément indispensable du fonctionnement social » (Fischer, Spire : 2009) qu’il convient d’analyser avec détails.
A l’époque contemporaine, les luttes sociales et environnementales se croisent et interrogent une série d’enjeux identitaires. Elles préfigurent un mouvement de renforcement de ces communautés en tant que nouveaux corps politiques où les enjeux environnementaux jouent un rôle crucial. Les illégalismes soumis à ces multiples négociations économiques, politiques « s’inscrivent dans des luttes ou on sait qu’on affronte à la fois la loi et la classe qui l’a imposée. » (Foucault, 2004). Ces conflits entre acteurs aux intérêts divergents mettent en lumière des processus de résistance aux formes variées. Ces micro-politiques sont à explorer dans leur traduction les plus matérielles, piquet de grève, blocage de route, manifestations, occupation de terrain. Mais aussi dans leur dimension idéelle : mythes, récits, rituels. L’approche anthropologique, adossée à une sociologie des mouvements sociaux, éclairera ces différentes luttes politiques qui ont lieu dans des environnements géographiques différents (désert, forêt, zones humides). C’est pourquoi, l’approche géographique ici est essentielle. Elle questionne tout à la fois l’intégrité territoriale et sa codification juridique et permet d’analyser les déclinaisons politiques de différents droits de propriété qui se construisent comme un faisceau de droits (Congost, 2007).
Sur le plan linguistique, la langue dessine un nouvel enjeux politique et identitaire des nouvelles communautés autochtones et devient alors critère de reconnaissance juridique. En Argentine, le critère linguistique est au centre du dispositif étatique de reconnaissance des populations autochtones. La constitution argentine déploie de nouvelles logiques constitutives qui unissent langue et territoire, deux problématiques attachées à la question identitaire. Elle intègre donc la notion de territorialité au cœur même de la problématique identitaire et linguistique, ce qui à terme tend à cloisonner les revendications politiques de ces communautés dans un primordialisme qui leur est étranger. Pourtant, les liens qui existent entre identité, langue et territoire sont complexes et mouvants. Le sentiment d’appartenance à une communauté renvoie à une multitude de facteurs, liens interpersonnels, allégeance, implication politique ou réseaux de parenté. Si le critère linguistique devient instrument du politique, dans certains cas il arrive à s’imposer également en tant que catégorie politique et devenir un puissant levier d’identification et de positionnements ethniques (Boyer, 2022). En ce sens, nous nous pencherons sur les illégalismes linguistiques et aux multiples processus de création, de bricolage et d’adaptation des communautés pour s’affranchir de ces interdits linguistiques.
Axes indicatifs :
Droits de propriété et dynamiques territoriales
Mots-clés : possession, propriété, troupeaux, communautés, agriculture.
Droits environnementaux et souveraineté politique
Mots-clés : communautés paysannes, agriculture, ONU, communautés autochtones, agroécologie, biodiversité.
Illégalismes linguistiques : mots du politiques, héritages historique.
Mots-clés : guarani, langue officielle, enseignement, oralité, interdit
Table thématique. Ateliers, projections, témoignages.
En complément des trois axes d’étude, ce colloque proposera une table thématique autour du processus de reconnaissance des communautés autochtones d’Amérique australe. Nous invitons les communautés, experts, acteurs de la société civile, ONG à participer à cette table thématique sous divers formats : témoignages, vidéos, poster poème. Cette table thématique proposera diverses activités : présentation des projets de recherche en cours, conférences, projection de documentaire. Nous invitons les jeunes chercheurs (étudiants de licence, master et doctorants) en sciences humaines et sociales mais aussi les travaux d’agronomes, biologistes et juristes à venir échanger et dialoguer autour de cette thématique.
Conditions de soumission
Les propositions de communication (500 mots) en français ou espagnol, comportant le nom de l’auteur, l’institution de rattachement doivent inclure le titre de la communication, la problématique traitée, la méthodologie d’analyse et sont à adresser à coloqilegalismo chez gmail.com avant le 05 février 2024
Organisateurs
Agathe Alexandre (Université Sorbonne Nouvelle/CREDA)
Maxime-Joseph Marasse (UNSAM/IIGHI)
Comité d’organisation
Christophe Giudicelli (Centre Franco-Argentin)
Guillermo Wilde (UNSAM/Conicet)
Nicolas Richard (CNRS/IFEA/UAR 3337)
Fatima Valenzuela (IIGHI/UNNE/Conicet)
Enrique Schaller (IIGHI/UNNE/Conicet)
Maria Laura Salinas (IIGHI/UNNE/Conicet)
Comité scientifique
Capucine Boidin (IHEAL/CREDA/USN)
Élodie Blestel (EA 7345/USN)
Diego Escolar (UNCuyo/Conicet)
Camille Laurent (PRODIG/Paris 1 Panthéon Sorbonne)
Christophe Giudicelli (Centre Franco-Argentin)
Guillermo Wilde (UNSAM/Conicet)
Nicolas Richard (CNRS/IFEA/UAR 3337)
Fatima Valenzuela (IIGHI/UNNE/Conicet)
Enrique Schaller (IIGHI/UNNE/Conicet)
Maria Laura Salinas (IIGHI/UNNE/Conicet)
Colloque
Du 27 au 29 mars 2024 (Campus Condorcet/Maison de la recherche-Sorbonne Nouvelle Paris 3)
Page créée le jeudi 4 janvier 2024, par Webmestre.