Appel
Date limite de soumission : mercredi 30 mars 2022
Journée d’études de l’Association française d’histoire religieuse contemporaine, 24 septembre 2022
Le terme d’empires est désormais bien implanté dans le paysage historiographique français, et la définition de Jane Burbank et Frederic Cooper peut être ici reprise pour en donner les premiers contours : « vastes unités politiques, expansionnistes ou conservant le souvenir d’un pouvoir étendu dans l’espace, qui maintiennent la distinction et la hiérarchie à mesure qu’elles incorporent de nouvelles populations » (Jane Burbank, Frederick Cooper, Empires in World History. Power and the Politics of Difference, Princeton, Princeton University Press, 2010). Derrière les notions d’expansion et de hiérarchie, c’est une variété très importante d’empires que l’on peut prendre en compte pour la période contemporaine : empires austro-hongrois, russe, ottoman ou encore chinois ; empires coloniaux, hérités de la période moderne ou nouveaux venus, européens mais aussi américain et japonais ; empire fasciste, empire nazi, voire empire soviétique.
Tous ont été confrontés à la diversité religieuse et y ont apporté des réponses variées, depuis la tentative d’imposition d’un monothéisme religieux (l’empire espagnol) au maintien et à la gestion de cette diversité (la dhimmitude dans l’empire ottoman). La question de la hiérarchisation des religions par les Européens est également essentielle, qui établit une échelle de valeur, du paganisme – aussi bien animisme et chamanisme que bouddhisme et culte des ancêtres – aux monothéismes. Le sujet des missions, enfin, connaît d’important renouvellements.
Face à une impossible synthèse, l’enjeu de la journée d’études est de proposer plusieurs pistes de réflexion autour de l’axe « empire », dans une période qui va de la fin du XVIIIe siècle au début du XXIe siècle, permettant ainsi d’entrer en dialogue avec les historiographies de la période moderne ainsi que postcoloniale. L’objectif est aussi de mettre en valeur des travaux récents, des approches renouvelées et des questions exploratoires. À cette fin, quatre axes sont envisagés, qui laissent une part importante aux phénomènes coloniaux et aux missions, mais sans s’y limiter :
les liens entre pouvoir impérial et sujets impériaux/minorités impériales à travers la religion. À partir de la représentation de l’autre comme un autre ou de l’autre comme un soi-même (Paul Ricoeur), deux types de relations voient le jour. Dans le premier cas, il s’agit d’une relation conflictuelle, d’une déculturation, de « religions assassinées » (Aimé Césaire, Discours sur le colonialisme, 1950). Dans le second, il y a la possibilité d’un dialogue, par exemple islamo-chrétien, de transferts culturels (Rudyard Kipling, « La Loge-Mère », 1896 : « Mahomet, Dieu et Shiva jouaient à cache-cache dans nos têtes »). Sans doute peut-on aussi considérer un éventail de possibilités entre ces deux situations, qui révèlent combien les empires furent le lieu de confrontations, d’oppositions, de révoltes, mais aussi d’échanges (à tous les niveaux : théologiques, mais aussi culturels, ou dans les pratiques), d’emprunts, d’appropriations. On pourra aborder les formes de réappropriation des normes impériales par les élites locales, les formes de syncrétisme, des tentatives de christianisation ou d’encadrement de cultes locaux par les Eglises.
les identités missionnaires, féminines et masculines. Cela renvoie aux questions déjà travaillées des liens entre colonisation et mission, mais on souhaiterait encourager les études sur l’engagement féminin missionnaire dans les empires, qu’il s’agisse des congrégations féminines ou d’autres actrices au sein des empires. Quels liens entretiennent ces femmes avec les populations sur place ? Avec les missionnaires masculins ? Au-delà des confrontations et des collaborations entre missionnaires sur le terrain, en fonction des appartenances impériales, nationales et religieuses, l’objectif est de prendre en compte le genre, afin d’étudier le partage des tâches au quotidien ainsi que les identités véhiculées par les missionnaires dans les sociétés impériales.
les soubassements idéologiques, voire théologiques, qui fondent l’action religieuse sur le terrain. Peut-on proposer des distinctions en fonction des différentes organisations, qui se manifesteraient – ou non – dans les pratiques de terrain, dans le choix des activités, dans le rapport aux populations locales ? Cela revient à comprendre les motivations, personnelles et collectives, derrière les œuvres d’enseignement, de soins, ou plus généralement humanitaires.
spatialités religieuses à l’intérieur des empires. Comment penser le lien entre urbain et rural à travers la religion ? Il y a une concentration d’établissements religieux dans les villes (lieux de culte, écoles, collèges, orphelinats, cimetières, etc.), mais les missions se trouvent aussi au cœur des campagnes avec pour projet de créer des villages de convertis comme les réductions jésuites au Paraguay. Les chrétiens veulent se rendre visible dans le paysage (cf. Notre-Dame d’Afrique à Alger). D’autres exemples peuvent illustrer cette emprise spatiale du religieux dans les empires, qui renvoie à la place du fait religieux dans les sociétés.
Les propositions de communications – de 500 mots maximum et accompagnées d’une brève présentation de l’auteur – sont à envoyer avant le 30 mars 2022 à Marie de Rugy derugy chez unistra.fr, avec pour objet « AFHRC ».
Comité scientifique :
Marie-Emmanuelle Chessel (CNRS, CSO, Sciences Po Paris), Charlotte Courreye (Jean Moulin Lyon 3), Michel Fourcade (Paul-Valéry Montpellier 3), Frédéric Gugelot (Reims Champagne-Ardenne), Frédéric Le Moigne (Bretagne occidentale), Marie Levant (Gerda Henkel Stiftung), Charles Mercier (Bordeaux), Olivier Sibre (Institut Georges Pompidou, Paris), Claire Toupin-Guyot (IEP de Rennes), Nina Valbousquet (École française de Rome).
Colloque
Samedi 24 septembre 2022 (Maison de la Recherche de Sorbonne Université)
Journée d’étude de l’Association française d’histoire religieuse contemporaineorganisée avec le soutien du Laboratoire ARCHE (Université de Strasbourg)
Les empires, de nature fort variée, ont tous été néanmoins confrontés à la diversité religieuse et y ont apporté des réponses différentes, depuis la tentative d’imposition d’un monothéisme religieux (l’empire espagnol) au maintien et à la gestion de cette diversité (dans l’Empire ottoman par exemple). La question de la hiérarchisation des religions par les Européens est ici essentielle, qui établit une échelle de valeur, du paganisme – aussi bien animisme et chamanisme que bouddhisme et culte des ancêtres – aux monothéismes. Face à une impossible synthèse, l’enjeu de la journée d’étude est de proposer plusieurs pistes de réflexion autour de l’axe « empire », dans une période qui va de la fin du XVIIIe siècle au début du XXIe siècle, permettant ainsi d’entrer en dialogue avec les historiographies de la période moderne ainsi que postcoloniale.
24 septembre 2022 Maison de la Recherche de Sorbonne Université – 28 rue Serpente 75006 Paris, Amphithéâtre Molinié (Rez-de-chaussée).
9h Accueil des participants, et introduction par Marie de Rugy (Université de Strasbourg)
9h30-12h : Le facteur religieux dans les politiques impériales
Présidence : Catherine Maurer (Université de Strasbourg)
Pascal Bourdeaux (EPHE), Sacrés Empires. Repenser le contact franco-vietnamien au prisme du principe d’autorité et de leurs régimes d’historicité (1820-1860).
Simon Deschamps (Université Toulouse 2-Jean Jaurès), Franc-maçonnerie et communauté Parsi dans l’Inde britannique du XIXe siècle : entre acculturation et appropriation.
Jakub Štofanik (Institut Masaryk, Académie des sciences de la République tchèque, Prague), Le spiritisme comme marge de la religiosité austro-hongroise au début de XXe siècle.
Edouard L’Hérisson (IFRAE–EFEO), Appropriation de l’espace et intégration à la généalogie impériale : le shintō en Mandchourie et dans la péninsule coréenne sous occupation japonaise.
Myriam Yakoubi (Université Toulouse 2-Jean-Jaurès), Représentations et traitement politique de l’islam chiite chez les fonctionnaires britanniques au début du mandat en Irak (1918-1924).
13h30-15h : La mission au féminin
Présidence : Claire Fredj (Université Paris Nanterre)
Alice Decouvelaere (Université Paris-Saclay), Quand les missions britanniques figurent le martyre au féminin (Huashan, 1895).
Mélina Joyeux (Aix-Marseille Université), Les Sœurs blanches au contact des familles kabyles : interactions, stratégies et représentations (Algérie coloniale, 1878-années 1910).
Clélia Lacam (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne), Traverser les frontières ? Spatialités missionnaires et identités féminines (Gabon, années 1890 - années 1930).
15h-17h15 : Stratégies missionnaires et identités impériales
Présidence : Chantal Verdeil (Inalco)
Anne Dalles Maréchal (Groupe Sociétés, Religions, Laïcités), À la croisée des empires : le cas des missionnaires catholiques français en Mandchourie entre 1838 et 1860.
Giacomo Ghedini (Centre d’histoire de Sciences Po Paris), L’Œuvre du rachat et le déplacement des enfants africains en Europe : les missions entre les empires au XIXe siècle.
Rémy Madinier (CNRS-IAO), Sendangsono (1904) ou le baptême d’un nationalisme catholique inclusif dans les Indes Néerlandaises.
Édouard Coquet (École française de Rome), Violences et luttes de pouvoir à Hanoï (1921-1926) : les missionnaires gardiens de l’ordre colonial face au clergé vietnamien.
Discussion
17h15-17h45 : Assemblée générale de l’AFHRC
Contact : derugy [at unistra [dot] fr]
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