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Colloque
Du 7 au 9 novembre 2019 (Paris)
L’inscription se fera à crhxixe chez univ-paris1.fr
« La Guerre de Crimée (1853-1856) reste délaissée dans l’historiographie française du fait militaire. Elle n’a fait l’objet que de synthèses déjà anciennes et a connu pendant longtemps un relatif désamour, en étant associée, selon l’historiographie de la IIIème République, au Second Empire dont il fallait effacer la trace. L’étude la plus solide et la plus récente (1995) est à mettre sur le compte d’Alain Gouttman. Toutefois, si son travail se montre particulièrement érudit et objectif, il reste néanmoins fortement marqué par un tropisme encore net pour l’histoire-bataille. Ce retard de l’historiographie française est d’autant plus regrettable que la guerre de Crimée s’écrit à l’étranger, particulièrement en Angleterre, dans le cadre d’une histoire renouvelée des conflits de plus en plus souvent abordés dans une approche pluridisciplinaire.
En effet, la Guerre de Crimée marque, avec la Guerre de Sécession (1861-1865), un tournant historique et anthropologique majeur dans l’histoire du fait militaire, témoignant de transformations profondes dans la façon de combattre mais également dans le rapport qu’entretiennent les sociétés avec la guerre, que ce soit pendant ou après le conflit.
Ce colloque a donc pour ambition d’inscrire la guerre de Crimée dans cette nouvelle façon d’écrire l’histoire des conflits, en insistant sur trois aspects fondamentaux :
1) L’importance de l’anthropologie historique de la guerre moderne comme clé de compréhension des combats, des stratégies employées, du vécu et des sentiments des combattants, des relations réciproques entre la guerre et les sociétés.
2) La dimension transnationale, en introduisant une histoire comparée du conflit. La confrontation d’histoires croisées permettra de sortir du cloisonnement imposé par les seules approches nationales. Surtout, la guerre de Crimée ne devra pas être uniquement vue de l’Occident, il faudra donc évaluer sa perception et ses répercussions dans le monde russe et dans le monde ottoman.
3) La dimension socioculturelle du conflit et sa mémoire. La guerre de Crimée influence la société par l’investissement médiatiques, économique et symbolique de l’État, de l’armée et des civils.
Tenant compte de cette triple démarche méthodologique, nous avons décidé d’organiser le colloque autour de quatre axes majeurs.
I) Guerre et diplomatie
Dans cet axe teinté de géopolitique, il sera aussi bien question des causes de la guerre, des motivations des belligérants et des conséquences du conflit sur la diplomatie. La guerre de Crimée sera ainsi replacée dans le double contexte séculaire du concert des nations et de la question d’Orient. Si les causes religieuses du conflit ont probablement été surévaluées, les raisons économiques et le contrôle des Détroits sont au cœur des problématiques de la diplomatie européenne. La rupture de l’équilibre diplomatique qui avait été maintenu, bon an mal an, depuis 1815 est également un sujet de préoccupation majeure des cabinets et pousse à des réflexions sur le droit international et sur la paix du continent européen qui conduisent au traité de Paris (30 mars 1856).
II) Vivre la guerre
La guerre de Crimée marque des bouleversements importants dans l’expérience des combats par les soldats. L’évolution des techniques d’armement (le fusil à canon rayé, les obus explosifs) et des stratégies militaires (apparition de la guerre de tranchées) accroît les risques, les atteintes corporelles et la létalité. Des nouvelles blessures apparaissent, tandis que le choléra décime les troupes. Ceci pousse alors à créer de nouvelles structures d’encadrement médical (rôle de Florence Nightingale, de Valérie de Gasparin, d’Elena Pavlovna). On se mobilise également à l’arrière, comme en témoignent les nombreuses souscriptions levées pour les familles des soldats morts et blessés en France et en Angleterre, ainsi que le travail mené par Anatole Demidov vis-à-vis des blessés et des prisonniers dans toute l’Europe.
III) Économie, société et opinion publique
L’impact de la guerre de Crimée dépasse de très loin le cadre des simples opérations militaires. Une véritable économie de guerre se développe avec le recours à l’emprunt et l’émergence d’entrepreneurs de guerre. Dans le cas ottoman, l’investissement militaire est décisif dans la création de la Banque impériale ottomane qui conduit à la mise sous tutelle par les puissances européennes d’une Sublime Porte surendettée. Les sociétés vivent également au rythme de la guerre. Une véritable « union sacrée » se met en place dans tous les États, bien alimentée par des gouvernements qui cherchent à mobiliser leurs opinions publiques contre l’ennemi. En effet, ce rôle accru de l’opinion publique est d’autant plus évident que le traitement de l’information militaire connaît des modifications majeures avec l’émergence du télégraphe et de la photographie.
IV) Images, représentations et mémoire
La vision de la guerre est transformée et pousse ainsi à utiliser les leviers de l’histoire culturelle (importance de l’art dans la guerre), de l’histoire des représentations et de l’histoire des imaginaires. Bien que le culte de l’officier héroïque soit maintenu (Saint-Arnaud en France, Gortchakov en Russie), les simples soldats trouvent leurs lettres de noblesse, comme en témoignent les nombreux monuments aux morts qui leur sont dédiés. De fait, la guerre de Crimée possède une dimension mémorielle très forte, comme l’attestent ses retombées en matière de toponymie et sa place dans les références historiques de certains dirigeants politiques actuels."
Comité d’organisation : Marie-Pierre Rey (Université Panthéon-Sorbonne, SIRICE), Éric Anceau (Sorbonne Université, LabEx EHNE), Jean-François Figeac (Sorbonne Université, Centre d’histoire du XIXème siècle).
Conseil scientifique
Éric Anceau (Sorbonne Université, LabEx EHNE),
Yves Bruley (Ecole pratique des hautes études),
Walter Bruyère-Ostells (IEP d’Aix-en-Provence),
Lorraine de Meaux (Université Panthéon-Sorbonne),
Hervé Drévillon (Université Panthéon-Sorbonne, directeur de la recherche historique au SHD),
Anne-Laure Dupont (Sorbonne Université, Centre d’histoire du XIXème siècle),
Edhem Eldem (Collège de France, chaire d’histoire turque et ottomane),
Jean-François Figeac (Sorbonne Université, Centre d’histoire du XIXème siècle),
Orlando Figes (Birkbeck College de Londres),
Hubert Heyriès (Université Paul Valéry/ Montpellier III),
Catherine Horel (Université Panthéon-Sorbonne, SIRICE),
Jean-Noël Luc (Sorbonne Université, Centre d’histoire du XIXème siècle),
Silvia Marton (Université de Bucarest),
Nicolae Mihai (Université de Craiova),
Catherine Mayeur-Jaouen (Sorbonne Université, Centre d’histoire du XIXème siècle),
Marie-Pierre Rey (Université Panthéon-Sorbonne, SIRICE),
Odile Roynette (Université Bourgogne Franche-Comté),
Özgür Türesay (Ecole pratique des hautes études).
Institutions partenaires : Fondation Napoléon, Service historique de la Défense.
Langues du colloque : Français / Anglais
Page créée le mardi 29 octobre 2019, par Dominique Taurisson-Mouret.