SOUS LA IIIème REPUBLIQUE |
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Avec ses colonies, un Etat peut choisir de régler ses relations financières selon deux conceptions opposées : l’assimilation ou l’autonomie. « La première consiste à considérer chaque territoire colonial comme une fraction du territoire national et à le doter d’une organisation analogue à celle d’une circonscription métropolitaine. Le système de l’autonomie, au contraire, laisse à chacune des entités en présence son individualité et ses charges ; la colonie garde les recettes perçues sur son territoire et pourvoit aux dépenses de tout ordre.» Ce système peut être tempéré de deux façons : d’une part, l’Etat, souverain, peut prendre à son compte certaines dépenses dites de souveraineté , et fournir des subventions ; d’autre part, les colonies peuvent être amenées à contribuer au budget de la métropole.Le régime de l’autonomie, adopté comme système définitif par la plupart des Etats modernes, n’a cessé de se développer dans nos colonies à partir de 1854 avant d’être définitivement consacré par la loi du 13 avri1900. Avec cette loi c’est l’ensemble de notre domaine colonial qui a été soumis au principe de l’autonomie : « les Antilles et la Réunion où s’appliquait le Sénatus - Consulte du 4 juillet 1866, l’Indochine où les décrets des 8 février1880, 17 octobre 1887, 11 mai 1888 et 31 juillet 1898 avaient réalisé une autonomie particulièrement accentuée, les autres possessions soumises au régime du décret du 20 novembre 1882. » L’article 33 de la loi du 13 avril 1900 a soumis toutes les colonies à la même règle : « Toutes les dépenses civiles et de la gendarmerie sont supportées en principe par les budgets des colonies. Des subventions peuvent être accordées aux colonies sur le budget de l’Etat. Des contingents peuvent être imposés à chaque colonie jusqu’à concurrence des dépenses militaires qui y sont effectuées.» Ainsi, « le principe est net : toutes les dépenses civiles, même celles dites de souveraineté, sont à la charge des colonies ; les dépenses militaires, tout en étant payées par l’Etat, peuvent le cas échéant, être remboursées, en tout ou en partie, par les colonies. »
Après 1900, on a réduit voire supprimé les subventions pour beaucoup de nos colonies. C’est ce qu’indique M. Mérat, inspecteur des colonies, dans sa thèse éditée en 1927 et il ajoute que : « L’aide financière de la métropole tend à se borner à la garantie des emprunts des colonies, qui constitue une avance souvent productive d’intérêts et non une subvention. » . Dans le même sens, son confrère Bernard Sol écrit, dans un ouvrage de 1933, que seule, l’Afrique Equatoriale Française reçoit désormais des subventions régulières pour parer à l’insuffisance permanente de ses ressources normales. De plus, on a imposé à nos possessions « des contributions pour un certain nombre de dépenses, effectuées non sur leur territoire, mais dans la métropole, et présentant un intérêt colonial ». Parmi celles-ci, on peut relever la contribution aux dépenses d’entretien de l’Ecole coloniale. Et ces contributions n’auraient fait que croître selon M. Mérat : « il n’est pas de loi de finances où une augmentation ne se manifeste, soit par le taux des contributions soit par une nouvelle rubrique ».
Par contre, les dépenses pénitentiaires motivées par l’entretien des condamnés métropolitains demeurent entièrement à la charge de l’Etat bien que s’effectuant sur le territoire colonial.La loi du 13 avril 1900 ayant mis à la charge des colonies les dépenses d’intérêt exclusivement local, elles étaient dotées de la personnalité civile. Mais le principe n’a seulement été énoncé que par l’article 56 du décret du 30 décembre 1912. M.Sol désigne ce décret comme constituant « la charte financière de nos colonies » .Aussi est-il intéressant de relever certaines de ses dispositions. Dans tous les actes de la vie civile, les colonies ont pour représentant le Gouverneur (art.57). D’autre part, « dans les groupes de colonies constitués en gouvernements généraux, le gouvernement général est doté d’une personnalité civile indépendante de celle des colonies qui le composent. Chaque colonie du groupe conserve son autonomie administrative et financière, sous réserve des droits et charges attribués au gouvernement général par des décrets organiques » (art.56). « Le gouverneur général représente le groupement pour les actes intéressant les finances du gouvernement général » (art. 57).
« Les dépenses d’intérêt local à effectuer pour le service de chaque exercice et les recettes affectées à ces dépenses forment, dans chaque colonie, le budget local de cet exercice. Dans les groupes de colonies constituées en gouvernements généraux, les dépenses d’intérêt commun sont inscrites à un budget général, alimenté en recettes par les produits énumérés dans les actes organiques concernant chaque gouvernement général, ou déterminés par des actes subséquents » (art.63). Il existe également des budgets annexes (formés par les recettes et les dépenses concernant spécialement certains territoires dépendant d’une colonie ou concernant l’exploitation de grands services comme les chemins de fer, les ports, etc…) et des budgets spéciaux d’emprunt (art. 63). A côté de ces budgets fonctionnent également « des budgets correspondant à des entités administratives moins importantes : budgets provinciaux, en Cochinchine, au Tonkin et en Annam, budgets résidentiels au Cambodge, budgets régionaux à Madagascar, budgets communaux, budgets d’établissements de bienfaisance »La comptabilité financière du service local obéit en principe aux mêmes règles que celle de l’Etat (art.58).Les projets de budget sont préparés par le gouverneur de chaque colonie (ou le gouverneur général), d’après une nomenclature type fixée en recettes et en dépenses par le ministre des Colonies (art. 68). Dans les colonies groupées en gouvernements généraux, les charges et les ressources sont réparties entre le budget général et chacun des budgets locaux. Cette répartition résulte des actes organiques des gouvernements généraux.
En matière d’arrêté, délibération ou vote du budget les règles varient en fonction des possessions. « Dans les groupes de colonies constitués en gouvernements généraux, le budget général est approuvé par décret, rendu sur le rapport du ministre des Colonies, et les budgets locaux sont approuvés par arrêté du Gouverneur Général rendu en Conseil de gouvernement. Toutefois, dans les colonies d’Afrique dépendant d’un gouvernement général, le budget local continue d’être approuvé par décret.» (art.69). Les budgets sont rendus exécutoires par des arrêtés locaux, avant l’ouverture de l’exercice (art.70).Les budgets généraux et locaux des colonies sont rendus publics par la voie de l’impression et communiqués au Parlement. Ils sont notifiés au Trésoriers - payeurs et aux contrôleurs des dépenses engagées. (art.71)
Aller étudier les budgets du ministère de la justice et du ministère des colonies en métropole