SOUS LA IIIème REPUBLIQUE |
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Tout d’abord, il convient de relever une particularité des budgets indochinois : ils étaient établis en piastres. C’était le cas depuis 1882 pour le budget local de la Cochinchine lorsqu’un décret du 4 juillet 1904 a étendu cette disposition à tous les budgets de l’Union Indochinoise.L’institution d’un budget général de l’Indochine, superposé aux budgets locaux de la Cochinchine et des protectorats date de 1898. Auparavant, les recettes et les dépenses de nos possessions indochinoises se répartissaient entre les quatre budgets locaux de la Cochinchine, du Cambodge, de l’Annam -Tonkin et du Laos d’une part, et, d’autre part, celui de la métropole.
Le budget de la Cochinchine créé par le décret du 10 janvier 1863 devait faire face à toutes les dépenses locales, sauf celles des services militaires et de la marine (les traitements du gouverneur et du trésorier étaient également à la charge de l’Etat). Bien que le budget cochinchinois supportât par la suite des dépenses importantes (notamment jusqu’ en 1891, il acquitta les dépenses du protectorat du Cambodge) il ne fit jamais appel aux subventions de la métropole. Le gouverneur était investi par le décret du 10 janvier 1863 du droit de préparer, arrêter et rendre exécutoire le budget local. Un conseil consultatif était appelé à donner son avis sur le budget. Un décret du 8 février 1880 institua un conseil colonial et le budget cochinchinois fut alors approuvé par le gouverneur en conseil privé. En conséquence de « l’institution du gouverneur général de l’Indo-Chine, le gouverneur de la Cochinchine devint lieutenant-gouverneur et l’approbation du budget passa au gouverneur général. » Après 1891, ce dernier centralisa également l’exécution de tous les budgets indochinois.
Lors de l’établissement du protectorat de la France sur le Cambodge (traité du 11 août 1863) le royaume garda son indépendance financière : « Les services français établis pour la représentation du protectorat grevèrent le budget de la Cochinchine. Le gouvernement royal se chargeait de pourvoir à tous autres services ». Il n’y eut plus qu’un seul budget pour le Cambodge à partir de 1892. En 1888, le gouvernement métropolitain acquit le droit d’arrêter définitivement le budget du Cambodge (décret du 7 septembre).
Pour le protectorat de l’Annam-Tonkin, le pouvoir financier appartenait au résident général : « C’est lui qui dressait le budget avec le concours des résidents et du Kinh-luoc ». Le décret du 27 janvier 1886 exigeait l‘approbation par décret rendu en conseil des ministres du budget local (tandis que pour la Cochinchine et les autres colonies le budget local voté par le conseil colonial ou les conseils généraux était exécutoire). Cette règle semble s’expliquer « par la nécessité où allait se trouver la métropole de participer dans une large mesure aux charges de l’Annam-Tonkin. » Dés 1887 le gouverneur général fut investi en matière budgétaire des droits conférés auparavant au résident supérieur.
Le budget du Laos fut constitué par un arrêté du gouverneur général du 30 septembre 1895 : « Il était divisé en deux sections : Haut et Bas-Laos ; préparé par les commandants supérieurs et approuvé par le gouverneur général en Conseil supérieur. »
Enfin, le budget de l’Etat comprenait avant 1898, selon M. Breton : « du chef de la Cochinchine et de l’Annam-Tonkin les dépenses militaires et les pensions civiles et militaires ; pour le Cambodge, les dépenses des troupes européennes ; puis, une subvention au câble du Tonkin et les services maritimes postaux entre la France et l’Extrême-Orient. »
Mais la logique, comme les faits, imposaient la création d’un budget général pour l’Indochine entière laissant subsister les budgets locaux : c’est ce que fit le décret du 31 juillet 1898. Il organisa la répartition des ressources et des dépenses entre le budget général et les budgets locaux. Ainsi, si le budget général devait pourvoir aux dépenses du service de la justice française (art.2) les budgets locaux étaient chargés des dépenses de la justice indigène et des services pénitentiaires (art.4). Les Conseils locaux, Conseil colonial en Cochinchine, Conseil du Protectorat au Tonkin, en Annam et au Cambodge délibéraient sur les budgets locaux tandis que, seul, le Conseil supérieur de l’Indochine délibérait sur le budget général. Le gouverneur général était ordonnateur des dépenses du budget général (art.6) et il devait, en conseil, arrêter et rendre exécutoires les budgets locaux (art.8 D. 31.07.1898 et art.40 D. 20.11.1882).
Les principes posés en 1898 furent consacrés par quatre décrets du 20 octobre 1911 qui accentuèrent la décentralisation locale. Le deuxième de ces décrets réorganisait le budget général et les budgets locaux. Dans son article 2, il indiquait les dépenses auxquelles pourvoyait le budget général et, y figuraient, en matière de justice, les dépenses du parquet général et des cours d’appel.
Ce budget général était arrêté par le gouverneur général en conseil de gouvernement et approuvé par décret. (art.4). Quant aux budgets locaux ils pourvoyaient « à toutes les dépenses autres que celles inscrites au budget général, ou aux budgets des municipalités ou des chambres de commerce » (art.8). Ils étaient établis de la façon suivante : ceux de l’Annam , du Tonkin, et du Cambodge par le résident supérieur en conseil de protectorat ; celui du Laos par le résident supérieur et celui de Quang-Tchéou-Wan par l’administrateur du territoire. Le budget local de la Cochinchine était délibéré par le conseil colonial et arrêté par le gouverneur en conseil privé. Tous ces budgets étaient approuvés et rendus exécutoires par le gouverneur général en conseil de gouvernement (art.9).